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Dépression associée : agir sur tous les fronts

Dépression associée : agir sur tous les fronts

Publié le 21 mars 2025
Dépression Thérapie 

Dans le monde, 16 % des adultes connaîtront la dépression au moins une fois dans leur vie. Un chiffre encore plus élevé chez les personnes atteintes d’un trouble mental ou somatique. Alors comment accompagner ces patients si vulnérables ?

Dépression associée : agir sur tous les fronts

Cet article fait partie d'un dossier sur la dépression disponible ici.

 

Tristesse et ruminations d’idées noires, manque d’intérêt et apathie, troubles du sommeil et de l’alimentation… L’épisode dépressif caractérisé (EDC), souvent appelé dépression, est l’une des pathologies mentales les plus fréquentes. C’est aussi l’une des plus connues et des mieux repérées.

Références :

  • https://pulsations.hug.ch/article/des-cles-pour-sen-sortir
  • https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/depression
  • https://www.frm.org/fr/maladies/recherches-maladies-neurologiques/depression/focus-depression

Une associée non désirée

Selon le docteur Nicolas Neveux, psychiatre, auteur du site e-psychiatrie.fr et du livre Pratiquer la Thérapie Interpersonnelle (TIP), la dépression est aussi « la pathologie la plus associée à n’importe quel trouble » :

  • Les troubles du neurodéveloppement (TDAH, autisme, troubles spécifiques des apprentissages, trouble du développement intellectuel)
  • Les troubles psychiques (anxiété, phobie, troubles obsessionnels compulsifs…)
  • Les troubles psychiatriques (schizophrénie, troubles bipolaires, addictions…)
  • Les troubles somatiques (eczéma, douleurs chroniques…)

Des facteurs aggravants

Dans ces cas de figure, on parle d’une dépression associée.

Elle concerne une grande partie de ces patients. Par exemple, 70 % des personnes autistes présentent une comorbidité psychiatrique, avec la dépression en tête de liste, selon le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5). De même pour les troubles schizophréniques, anxieux ou addictifs, pour ne citer qu’eux.

En ce qui concerne les maladies somatiques, même combat : selon Cédric Lemogne, auteur du livre Actualités sur les maladies dépressives, les troubles dépressifs y sont deux à quatre fois plus fréquents chez les personnes qui en souffrent que dans la population générale.

Et souvent, que l’on parle de maladies chroniques ou de troubles psychiques, il s’agit de pathologies mal diagnostiquées. Cela constitue un facteur aggravant, puisque l’errance diagnostique peut être la source d’anxiété et le déclencheur d’un EDC. Le « rôle de l’estime de soi », parfois mise à mal par le « regard des autres et de ses proches », et l’accumulation des difficultés fonctionnelles au quotidien sont d’autres facteurs aggravants fréquents.

Mieux vaut prévenir que guérir

La récurrence des cas de dépression associée chez les personnes souffrant d’autres troubles justifie l’importance d’organiser des rendez-vous réguliers chez un psychiatre ou chez un professionnel de la santé mentale après l’annonce d’un diagnostic. Car une fois déclarée, il est d’autant plus difficile de se débarrasser d’une dépression.

« Avoir un trouble trahit une vulnérabilité du patient. Ils éprouvent plus de difficultés que d’autres personnes. Sur le plan cognitif, ils profitent moins des techniques de psychothérapie », reprend le Dr Neveux.

Adapter le suivi thérapeutique

C’est pour cette raison qu’une thérapie prend en compte la dépression mais aussi les autres troubles du patient, par ordre de priorité. Une dépression sévère doit être traitée avant tout ; lorsqu’elle est plus légère, ou une fois la personne revenue dans un état d’action, un travail autour de la pathologie sous-jacente peut commencer.

« Par exemple, pour une dépression causée par les difficultés d’un TDAH, mettre en place des stratégies au quotidien aura un effet sur l’humeur à long terme », précise Héloïse Masson, psychologue spécialisée en thérapies cognitivo-comportementales (TCC) et en thérapies interpersonnelles (TIP), les deux thérapies les plus efficaces pour traiter la dépression.

La TCC : un angle fonctionnel

De courte durée (entre quinze et vingt séances), ces méthodes réapprennent au cerveau à gérer des situations difficiles grâce à des exercices évolutifs à appliquer tous les jours. Par exemple, travailler sur la façon dont une situation est perçue par le patient peut se faire en plusieurs étapes. Ici, aller au supermarché :

🛟 Repérer les pensées négatives associées : aller au supermarché est perçu comme épuisant et anxiogène ;

🛟 Identifier des critères positifs : cela me permet d’acheter mon chocolat préféré, essentiel pour me calmer en cas de crise autistique ;

🛟 Trouver des solutions plus supportables : je peux mettre un casque anti-bruit pour réduire l’intensité des stimulations, aller dans un magasin durant ses heures silencieuses et en dehors des heures de pointe, ou faire mes courses en ligne.

TIP et pleine conscience, des outils complémentaires

Petit à petit, le cerveau prend de nouvelles habitudes qui tirent le patient vers le haut, et sa confiance en lui remonte. La TIP, quant à elle, suit la même logique mais s’intéresse aux relations sociales. Elle est indiquée lorsque la dépression découle d’une perturbation dans ces relations (deuil, conflit, changement de vie, isolement).

En parallèle d’une TCC ou d’une TIP, il est intéressant de proposer au patient une thérapie basée sur la pleine conscience (voir article Pleine conscience : prévenir les rechutes de dépression). « Ce suivi, associé à des médicaments si nécessaire, agit en prévention pour réduire les risques de rechute », complète le Dr Neveux.

Pas à pas

Cependant, attention au timing : commencées trop tôt ou de façon trop intense, ces thérapies peuvent être contre-productives. Car si une partie a lieu dans le cabinet d’un psychologue, le gros du travail se fait à la maison via des exercices à appliquer au quotidien. Le patient doit être apte à les faire, au risque de culpabiliser, se dévaloriser et empirer son état psychique.

L’objectif final, transformer les exercices les plus pertinents en habitude pour devenir autonome, ne peut être atteint que par une pratique régulière.

La dépression dans l'autisme

Les personnes avec un TSA présentent des risques particulièrement élevés de déclarer un ou plusieurs épisodes dépressifs au cours de leur vie.

66 % des adultes avec autisme sont confrontés à un EDC sévère au cours de leur vie, associé à des idées suicidaires,
• contre 16% dans la population générale. [1]

Plusieurs facteurs [2] l’expliquent, comme des difficultés sociales amenant à un sentiment de solitude, un risque élevé de harcèlement scolaire, une tendance à l’autocritique, une grande fatigabilité… Un facteur génétique s’ajoute à l’équation : des études montrent une surreprésentation d’EDC récurrents chez les parents d’enfants autistes, qui présentent ainsi un risque plus élevé de faire des dépressions.

Une fois installée, il est difficile de la repérer la dépression chez les personnes avec un TSA. Notamment à cause de leurs difficultés à identifier ce qu’elles ressentent, conséquence d’une déconnexion entre le corps et l’esprit, mais également à communiquer à ce sujet.

Par ailleurs, les personnes avec un TSA sont globalement réfractaires au changement. Or cette caractéristique s’applique également à leur état psychique : elles peuvent avoir du mal à concevoir qu’un changement émotionnel ou psychique est envisageable. Ce qui peut, en cas d’EDC, amener à de très longues périodes dépressives, sans volonté de la part d’en sortir.

"Dépression associée : agir sur tous les fronts" est un article écrit par Lucie Leclercq.

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Références :

[1] Selon l’Organisation mondiale de la santé.

[2] Tony Attwood, Michelle Garnett, Asperger : comment vaincre coups de blues et dépression ?, 2020, De Boeck Supérieur.